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Veillée Pascale - 11 avril 2020

Homélie - Samedi, 11 avril 2020

Veillée Pascale - Année A (Mt 28, 1-10)

Apprenons l'espérance.

Avez-vous déjà expérimenté ce qu’est la nuit? La nuit de votre chambre, la nuit de la ville, la nuit de la forêt? Que fait-on quand on est dans la nuit? Que fait-on quand on veut marcher dans la nuit? On cherche une lumière car, sans lumière, il est risqué de s’aventurer trop loin. On pourrait même dire qu’il serait mieux de ne pas bouger. Mais avec une lumière, si petite soit-elle, on peut avancer, qu’il s’agisse de la lumière d’une lampe de poche, de la lumière de la lune, de la lumière du ciel étoilé, de la lumière d’une flamme ou celle d’un flambeau.

La lumière ne fait pas disparaître la nuit, mais elle permet de marcher dans la nuit et d’arriver à bon port. Elle permet de nous rendre là où nous voulons aller. Si nous prenons une analogie avec la période actuelle, nous pouvons constater que, d’une façon étonnante et mystérieuse, l’humanité tout entière se retrouve plongée dans une nuit profonde. La nuit de la pandémie, la nuit de la COVID-19. Et nous cherchons une lumière, quelle qu’elle soit. Nous cherchons une lumière pour nous permettre d’avancer.

On pourrait élaborer sur la lumière de l’esprit humain qui, grâce à la science, cherche et trouve des solutions. On pourrait également parler de la lumière de l’âme humaine qui cherche à emprunter des chemins de solidarité.


Mais il y a avant tout la lumière de Dieu. Oui, la lumière de Dieu. Et la lumière de Dieu nous éclaire, un peu comme une flamme. Et que fait une flamme? Elle nous éclaire! Mais une flamme peut également nous réchauffer. Parce que, au cœur de la nuit, il peut aussi faire très froid. Dans ce cas, nous cherchons non seulement la lumière, mais nous cherchons aussi la chaleur.

La lumière de Dieu est une lumière qui a le pouvoir à la fois de réchauffer et d’éclairer.

Cette nuit, alors que nous célébrons la résurrection de Jésus Christ, nous célébrons la vie que rien ne peut arrêter, nous célébrons la mort que rien ne peut arrêter. Certes, la mort est puissante. Certes, la souffrance est puissante, mais la vie de Dieu est encore plus puissante. L’amour de Dieu est encore plus puissant.


Rien n’a pu empêcher Jésus Christ de ressusciter. Rien. Et comme rien n’a pu empêcher Jésus Christ de ressusciter, rien ne pourra l’empêcher de venir à nous, rien ne pourra l’empêcher de frapper à la porte de notre cœur pour nous offrir sa chaleur et sa lumière.

Jésus Christ a le pouvoir de nous réconforter quelle que soit la situation de solitude dans laquelle nous nous trouvons, quelle que soit notre situation d’isolement, quelle que soit la situation d’incertitude économique que nous éprouvons face à l’avenir. La lumière de Jésus Christ, et de Jésus Christ ressuscité qui est lumière, a le pouvoir de réchauffer notre cœur, quelle que soit notre peine devant la perte d’un être cher; je le répète, Jésus Christ ressuscité a le pouvoir de réconforter notre cœur, de le pacifier, de fortifier notre cœur.

Et Jésus a aussi le pouvoir de nous éclairer. Que puis-je faire pour aller de l’avant? Que puis-je faire pour me rapprocher de mes parents, de mon grand-père ou de ma grand-mère qui sont seuls? Que puis-je faire pour me rapprocher de ceux ou celles qui sont malades? Et comment faire pour continuer le combat lorsque je travaille dans un hôpital en tant que médecin, infirmière ou préposé et que je ne sais pas si je vais survivre à cette pandémie parce que je suis exposé à chaque instant à ce satané virus? Qu’est-ce que je peux faire?

Alors qu’elle a le pouvoir de nous donner la paix de l’âme, la lumière de Jésus Christ a en même temps le pouvoir de nous éclairer, elle a le pouvoir de nous guider dans nos gestes et dans nos paroles. Et elle peut nous guider même si nous ne savons pas combien de temps la nuit va durer. En soi, ne pas savoir combien de temps elle va durer fait un peu comme partie du mystère entourant la nuit. Lorsque quelqu’un est dans la nuit et qu’il sait que le jour s’en vient, il attend simplement que le soleil se lève!


Aujourd’hui, nous sommes plongés dans une nuit étrange et, dans le fond, nous ne savons pas combien de temps va durer la nuit de la maladie, cette nuit de la pandémie à laquelle nous sommes confrontés. En cette période particulière, rappelons-nous que la lumière de Jésus Christ a le pouvoir de nous guider, elle est capable de nous soutenir et de nous accompagner, quelle que soit la nuit qui nous entoure, quelle que soit la durée de la nuit. Parce que Jésus Christ est cette lumière dans la nuit dont nous avons besoin.

Même si une lumière dans la nuit peut paraitre fragile, elle éclaire tout de même. Même si une lumière dans la nuit peut apparaître bien faible, elle est suffisante pour voir où mettre le prochain pas. Et la lumière dans la nuit, c’est la lumière de Jésus Christ lui-même qui est une lumière très puissante. Aucune obscurité ne peut l’empêcher de nous éclairer, tout dépendra de l’ouverture de notre cœur, de l’ouverture de notre cœur envers lui, de comment nous choisirons de lui ouvrir notre cœur.


Par sa chaleur et sa lumière, Jésus Christ nous rend capables de reconnaître notre vulnérabilité. Ce n’est jamais facile de faire face à sa propre fragilité! Parfois, lorsque nous nous laissons prendre par l’activisme, pour ainsi dire, lorsque nous sommes dans le feu de l’action, il est facile d’oublier nos fragilités.

Dans la lumière de cette nuit où la pandémie nous a plongés, nous sommes plus que jamais confrontés à nos fragilités, qu’il s’agisse de nos fragilités personnelles, de nos fragilités familiales, de nos fragilités sociales. Et être confronté à notre propre vulnérabilité, à notre fragilité peut nous effrayer. Mais la lumière de Jésus Christ est aussi chaleur. Elle est lumière qui éclaire, mais elle est aussi chaleur divine qui réchauffe.

Par sa chaleur, la lumière de Jésus Christ vient nous aider à mieux voir notre fragilité, elle vient nous aider à nous libérer de la peur de voir nos fragilités. Il en est ainsi parce que cette lumière vient nous révéler que Jésus Christ est présent à nos côtés, que l’amour de Dieu se penche vers nous, que Jésus Christ est présent dans notre vie, que l’amour divin nous accompagne et nous précède dans l’accomplissement de la vie éternelle.

Avec Jésus Christ, nous sommes invités à ne pas craindre de prendre conscience de nos fragilités, de nos limites. Bien au contraire!

En affrontant nos fragilités et nos limites, nous reconnaissons tout simplement que nous avons besoin les uns des autres. Autant nous avons besoin de Dieu, autant nous avons des autres. Parfois, dans la force de l’action, nous avons l’impression que nous ne pouvons pas tout accomplir seuls.


La pandémie que nous traversons nous aura au moins appris que nous ne pouvons rien faire si nous demeurons seuls. On ne peut l’affronter qu’avec l’aide des autres. Avec l’aide de Dieu, mais aussi avec celle des autres. Et cette aide peut venir à travers des membres de notre famille ou de la société, avec l’aide des membres de nos mouvements ecclésiaux ou de nos associations.

Seuls, nous ne pouvons rien accomplir, nous avons besoin de l’aide des autres. N’ayons pas peur de dire « oui » à la fragilité de ne pas pouvoir se suffire à soi-même. N’ayons pas peur de dire « oui » à la fragilité de ne pas être autosuffisants. La lumière de Jésus Christ nous permet de reconnaitre nos fragilités, parce qu’il s’invite dans notre cœur et il vient l’ouvrir.


Notre fragilité devient comme une blessure qui nous transforme, une heureuse blessure, en quelque sorte. Il s’agit alors d’une blessure par laquelle la lumière de Jésus Christ peut entrer en nous. On peut la comparer à une fissure dans un mur qui laisse passer la lumière. Cette blessure devient alors la fissure dans notre cœur qui laisse passer la lumière divine.

En cette nuit où nous célébrons la résurrection de Jésus Christ que rien n’a pu arrêter. En cette nuit où nous célébrons la lumière de Jésus Christ qu’aucune lumière ne peut éteindre, qu’aucunes ténèbres ne peuvent éteindre, ouvrons notre cœur à sa lumière. Laissons-lui nous redire son amour, nous redire sa compassion, nous redire sa présence, nous redire son salut, nous redire sa vie. Laissons-le nous dire que la vie de Dieu est plus forte que toutes les nuits, que la vie de Dieu est plus forte que toutes les morts. Et laissons-nous guider par Jésus Christ sur un chemin de prière, sur un chemin de solidarité les uns envers les autres, sur un chemin d’espérance.

Ensemble, apprenons l’espérance.