Montréal

(Présence-info) Les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi 62 (neutralité religieuse de l'État), dont on entendra beaucoup parler cet automne, ont débuté la semaine dernière.

Après des années de débats acrimonieux sur la laïcité et les accommodements raisonnables et de projets de loi avortés, dont la Charte des valeurs, voici quatre mots qui aident à comprendre cette nouvelle tentative législative.

Le dépôt du projet de loi remonte au mois de juin 2015. Son titre exact - Loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l'État et visant notamment à encadrer les demandes d'accommodements religieux dans certains organismes - annonçait déjà l'approche que le gouvernement libéral de Philippe Couillard entendait prendre. Le projet de loi 62 «prévoit que les membres du personnel des organismes publics doivent faire preuve de neutralité religieuse dans l'exercice de leurs fonctions, ce qui implique de veiller à ne pas favoriser ni défavoriser une personne en raison de l'appartenance ou non de cette dernière à une religion», avait alors expliqué la ministre.

Articles

Le projet de loi 62 compte dix-huit articles qui tiennent sur sept pages et qui sont intégrés dans six chapitres. Le chapitre 2 s'intéresse aux mesures favorisant le respect de la neutralité religieuse de l'État tandis que le chapitre 5 explique les modifications que ce projet de loi entraîne pour les services de garde à l'enfance.

C'est le chapitre 3 du projet de loi qui sera sans doute le plus discuté. Il y est d'abord question des services à visage découvert. On précise qu'un «membre du personnel d'un organisme doit exercer ses fonctions à visage découvert». On ajoute qu'une «personne à qui est fourni un service par un membre du personnel d'un organisme doit avoir le visage découvert lors de la prestation du service».

On indique aussi les conditions d'acceptation ou de refus de mesures d'accommodement religieux. Toute demande d'accommodement doit respecter le droit à l'égalité entre les femmes et les hommes» et ne doit pas compromettre «le principe de la neutralité religieuse de l'État».

Laïcité

Le terme laïcité n'apparaît nulle part dans le texte du projet de loi 62. Ses rédacteurs ont plutôt utilisé l'expression neutralité religieuse de l'État.

Les premiers mots du texte législatif qui sera débattu ces prochaines semaines se lisent comme suit: «Considérant la neutralité religieuse de l'État, la présente loi a pour objet d'établir des mesures visant à en favoriser le respect. À cette fin, elle impose notamment aux membres du personnel des organismes publics le devoir de neutralité religieuse dans l'exercice de leurs fonctions».

Signes

Les expressions signes religieux ou encore les mots croix, kippa, kirpan ou voile n'apparaissent nulle part dans ce projet de loi. Pas plus que le mot vêtement d'ailleurs. La seule référence aux habits portés par des fonctionnaires ou les gens qui font affaire avec l'État québécois concerne l'obligation de recevoir et de donner des services à visage découvert. Il s'agit d'une allusion à la burka et au niqab, des vêtements portés par un très petit nombre de femmes musulmanes au Québec, et qui cachent entièrement leur visage.

Par ailleurs, il n'est guère mention des symboles liés à des religions et des noms à caractère religieux dans ce projet de loi. L'article 13 stipule toutefois que «les mesures prévues par la présente loi ne peuvent être interprétées comme ayant un effet sur les éléments emblématiques ou toponymiques du patrimoine culturel du Québec, notamment du patrimoine culturel religieux, qui témoignent de son parcours historique».

Donc, pas question de changer les vocables des municipalités ou des rues qui affichent le nom d'un saint ou d'une sainte de l'Église catholique. Pas question non plus d'enlever la croix du Mont-Royal. Et pas un mot sur le crucifix de l'Assemblée nationale.

Auditions

Jusqu'au 9 novembre, une commission parlementaire entendra les mémoires d'individus et d'organismes sur le projet de loi 62.
La Commission des institutions, formée de députés des différents partis à l'Assemblée nationale, prendra connaissance des réflexions d'une trentaine d'organismes dont la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, l'Association québécoise des centres de la petite enfance, le Congrès maghrébin du Québec et Fédération autonome de l'enseignement. Parmi les groupes liés à des Églises ou des religions qui présenteront des mémoires, on note l'Assemblée des évêques catholiques du Québec (participation de Mgr Christian Lépine, le jeudi 27 octobre à 12h15), le groupe Conversation interreligieuse canadienne, le Centre consultatif des relations juives et israéliennes et l'Association des musulmans et des arabes pour la laïcité au Québec.