Montréal

Avant Noël, le journal catholique national The Catholic Register a publié un article sur Momentum, un nouveau ministère qui offre des services aux mères monoparentales catholiques à Montréal. L’article met en relief l’histoire inspirante de Momentum Catholic Single Mothers, en traçant son développement à partir de ses origines modestes au cours d’une retraite de trois jours en 2016, et décrivant sa croissance soutenue jusqu’à devenir la communauté dynamique qui aujourd’hui coordonne pour des mères monoparentales catholiques des rencontres hebdomadaires, des retraites et d’autres événements communautaires. Nous tenons à partager cette bonne nouvelle avec le diocèse! Pour apprendre plus sur la communauté Momentum, sur ses services ou découvrir comment appuyer son ministère, veuillez visiter son site Web : www.momentummothers.org ou consulter sa page Facebook. Par ailleurs, Momentum a lancé en 2022 un nouveau podcast (disponible en anglais) : Catholic Single Mothers. La communauté se prépare à établir également un nouveau bureau francophone en début de 2023. En cheminant en synodalité à la suite du pape François, nous reconnaissons avec gratitude ce nouveau ministère, et nous prions que Momentum puisse continuer d’être un lieu de communion, de guérison et d’amitié, à la fois pour celles qui sont engagées dans cette communauté et pour l’Église entière.

Source - Par Anna Farrow, rapport spécial du Catholic Register, le 15 décembre 2022

C’était à Paris, lors d’une journée humide d’août, que Claire Brown a découvert qu’elle était enceinte. Elle travaillait à titre de recherchiste postdoctorale à l’Institut Curie, à des milliers de kilomètres de chez sa famille et de ses amis au Canada. Le père de l’enfant, ayant déjà fait preuve de son manque de fiabilité, a même accusé Brown d’égocentrisme du fait qu’elle n’avait pas voulu faire avorter leur enfant.

Seule, apeurée, elle s’est dirigée vers St. Joseph’s, église catholique anglaise située à quelques pas de l’Arc de Triomphe. Arrivée à l’intérieur, elle s’est mise à chercher un prêtre qu’elle connaissait déjà, le père Anthony. Il sera la première personne à laquelle Brown dira, en personne, qu’elle est enceinte.

« Il était si doux et si bienveillant », dit-elle.

Elle se souvient qu’au moment où le père Anthony lui a donné la « bénédiction pour les futures mères », elle s’est effondrée en larmes : « Jusqu’alors, je m’étais concentrée uniquement sur la grossesse. Je ne m’étais pas encore regardée comme mère ».

Avec le recul, Brown se rend compte de la chance qu'elle avait d'avoir un endroit sûr où aller lorsqu'elle était en crise. Mais il faudra attendre 16 « années très difficiles », dans cinq villes et cinq paroisses, pour que Brown trouvera un système de soutien aux mères célibataires dans l'Église catholique.

Après de nombreux déménagements, Brown s’est installée avec son fils à Montréal, où elle avait trouvé un poste à l’université McGill. En 2016, à un camp de vacances pour familles catholique situé à une heure de route au nord-est de Montréal. Elle a assisté à une retraite pour des femmes monoparentales. Se voulant une expérience « profondément transformatrice » et « l’amorcement du processus de guérison », cette semaine passée au bord du lac Maskinongé s’est avérée être la pierre angulaire de Momentum, un nouvel organisme qui vise à « bâtir une communauté de foi dynamique pour les femmes monoparentales ».

Pour Talitha Cere, organisatrice de la retraite de 2016 et cofondatrice de Momentum, le camp qui a accueilli la première retraite était un lieu familier. Les parents de Cere avaient créé le centre de retraite Dominus Vobiscum Retreat en 1998 dans le cadre d'une mission auprès des familles et des enfants. Chaque été depuis 24 ans, « Camp DV » est rempli de familles catholiques, grandes et petites, qui bénéficient de programmes d’enrichissement du mariage, de la pastorale des jeunes, ainsi que de la messe quotidienne, des matchs de volleyball de plage et des feux de camp au bord du lac.

Lorsque Cere est devenue mère monoparentale en 2004, cette chaleureuse communauté catholique au sein de laquelle elle avait grandi ne lui parut plus aussi accueillante. Elle tient à souligner qu’il ne s’agissait d’aucun geste de la part de qui que ce soit de sa famille ou de sa paroisse pouvant viser, de manière délibérée, à l’exclure : tout simplement qu’elle n’y trouvait plus sa place. À l'église, tout le monde semblait appartenir à ce qu'elle appelle « une famille intacte ». Elle se sentait très isolée et avait un profond désir de communauté ».

Les familles monoparentales représentent 16 % des structures familiales, selon le recensement canadien, et il est logique de reconnaître que des familles catholiques font partie de cette proportion. Selon l’expérience vécue par les femmes qui participent activement à l’organisme Momentum, ces familles demeurent méconnues, « inaperçues » au sein de l’Église. Jane Devlin, se retrouvant veuve à la mort de son mari décédé du cancer, dit : « Les veuves sont invisibles ».
Cette invisibilité recouvre toutes les mères célibataires, qu’elles le soient en raison d’un divorce, de la perte d’un mari ou du fait de ne s’être jamais mariée.
Au fil des ans, Cere s’est rendu compte que la rancune et la colère s'étaient enracinées en elle. Le barrage a finalement cédé lorsque son fils s'est préparé à recevoir le Sacrement de la réconciliation. On encourageait les parents à aller se confesser pour montrer à leurs enfants comment recevoir le sacrement. Pendant sa confession, Cere s’est retrouvée en train de se vider de toutes ces émotions d’amertume. Le prêtre a répondu avec compassion et, dans ce moment de grâce, elle a entendu un défi prononcé par Dieu, « Comment vas-tu changer ça »?

Cere s’est approché de ses parents pour demander si la direction du Camp DV considérerait la possibilité de libérer une semaine de l’horaire estival pour la consacrer à une retraite pour des mères monoparentales. La décision n’a pas été facile à prendre, puisqu’ils ne voulaient pas que la mission principale de Dominus Vobiscum soit compromise, ni que le personnel soit surchargé. Après avoir réfléchi et prié, ils ont approuvé sa demande, et sa mère fait maintenant partie de l'équipe de direction de Momentum.

La retraite est devenue un événement annuel. Deux ans plus tard, Brown a proposé à Cere l’idée de faire davantage d’événements au cours de l’année. Brown a pris l’initiative en organisant des rassemblements mensuels dans la région de Montréal. Il s’agissait d’une rencontre chaque dimanche soir dans deux paroisses; après avoir participé à la messe de 16 h ensemble, elles faisaient un souper-partage dans la salle paroissiale. Il y avait un programme d’activités pour les enfants et les femmes profitaient de l’occasion pour discuter et prier ensemble. Parfois le prêtre passait à l’improviste et d’autres fois non, mais ces soirées s’intégraient dans la vie régulière de la paroisse.

Pour Vicky Stanley, ces dimanches soirs ont été une bouée de sauvetage. Comme plusieurs d’autres femmes impliquées à Momentum, elle est immigrante, étant arrivée à Montréal de l’Argentine. Formée en beaux-arts et n’ayant pas de projets particuliers, elle a rencontré le père de ses deux enfants lorsqu’ils travaillaient ensemble au Musée des beaux-arts. Selon Stanley, la relation était difficile et, bien que « les alliances eussent été achetées, (le) couple ne s’est jamais marié ».
Peu de temps après leur séparation le père a choisi de vivre comme une femme. Cela a été un passage difficile pour Stanley et les enfants. Elle raconte comment, tout en « reconnaissant avoir besoin de Dieu dans ma vie, je ne me sentais pas pour autant membre de l’Église ». Elle décrit comme étant l’œuvre de la « main de Dieu » ce moment où elle est arrivée à l’église paroissiale de son quartier à la recherche d’un local à louer pour tenir la fête d’anniversaire de sa fille. C’est là où elle a rencontré Norah, une Péruvienne avec qui Stanley pouvait parler en espagnol et qui l’a mise en contact avec Momentum.
Dès sa participation à la première retraite, lors de laquelle Stanley et ses enfants ont partagé un chalet avec Brown et son fils, elle a vu s’élargir progressivement son cercle d’amies catholiques.

Elle s’est inscrite à un cours Alpha à la paroisse; elle a demandé de faire baptiser ses enfants et est devenue membre d’un groupe de prière. Pour Stanley et sa famille, les choses sont toujours dures, mais elle a découvert qu’elle « n’est pas toute seule » et qu’elle peut « trouver l’espoir en Dieu ».
La pandémie a apporté son lot de difficultés, mais lorsque Momentum a adopté une plateforme virtuelle pour ses réunions mensuelles de Momentum, cela a permis aux femmes vivant à l’extérieur de Montréal de participer. Cette expansion a mené à une transformation des idées sur la nature, la portée et, par conséquent, le potentiel et la perspective de cette communauté. L’an passé, on a pris des mesures pour officialiser la structure de l’organisme. Momentum a demandé à devenir un organisme de bienfaisance enregistré, et une campagne de financement réussie a assuré la création d’un poste administratif. Cere est maintenant directrice générale de Momentum. Cette année, l’organisme a reçu le statut d’organisme de bienfaisance enregistré et l’équipe poursuit la mise en place de bureaux partout à travers le pays.
Grâce au soutien de Soeur John Mary Sullivan, directrice adjointe du bureau des ministères et de l’action sociale de l’archidiocèse de Vancouver, les bases sont jetées pour la création d’un bureau dans ce diocèse. Angela Crawley d’Ottawa, mère monoparentale, collabore avec d’autres mères pour la création d’un bureau également dans la paroisse Divine Infant à Orleans. Faisant de cet effort une initiative véritablement d’un océan à l’autre, le père Rob Elford travaille en collaboration avec Khrista Jeffrey pour établir un groupe à Halifax. 

L’un des caractéristiques de Momentum est la façon dont l’organisme se sert des structures et organisations déjà existantes de la vie de l’église. Depuis plusieurs années, les Sisters of Life à Toronto dirigent les mères monoparentales vers Momentum afin qu’elles reçoivent du soutien. Pour Crawley et sa paroisse à Orleans, le fait de demander du soutien et des conseils auprès de la Ligue des femmes catholiques du Canada semble aller de soi. Derrière ou sous les communautés religieuses et laïques qui agissent comme collaborateurs, les membres de Momentum soulignent le rôle essentiel des prêtres et des sacrements.

En outre des autres projets, Momentum a aussi produit une série de conférences en ligne, dont l’une des plus récentes soulève la question : « Comment les paroisses peuvent-elles appuyer les mères monoparentales en temps de crise? » Parmi les suggestions proposées : citons la mise en place de services de garde d'enfants pour permettre à ces dernières d’avoir la possibilité d’assister aux activités paroissiales et aux événements de l’église qui ne visent pas exclusivement des couples.
Jane, visiblement troublée, fait appel à un autre genre de soutien, celui qui va au-delà des programmes et des activités. Elle a parlé du fardeau insupportable que représente « l'éducation d'enfants en deuil ». Tout en reconnaissant la sensibilisation actuelle entourant les adolescents et l’Église, elle « implore les hommes dans l’Église d’être des mentors pour mes fils ». Elle raconte avoir pris contact avec des organismes laïques, dont les Grands Frères Grandes Sœurs du Canada, mais que les listes d’attente sont si longues que ses fils seront adultes avant qu’ils n’arrivent en haut de la liste. Elle déplore que des groupes tels que les Chevaliers de Colomb semblent se focaliser plutôt sur la communauté que sur le soutien direct.

Cere décrit l’image de la famille idéale catholique telle l’icône de la Sainte Famille, avec saint Joseph debout abritant Marie qui, à son tour, tient l’Enfant Jésus et le protège. Et que deviennent donc les femmes et les enfants dans l’Église qui, pour quelque raison que ce soit, sont privés de ces piliers de protection? Grâce au travail de Cere, de Brown, de Jane, de Jeffrey, de Crawley et de tant d’autres, Momentum grandit afin de leur offrir un refuge sûr au sein de notre sainte Mère l’Église.