LETTRE PASTORAL DE MGR CHRISTIAN LÉPINE, ARCHEVÊQUE DE MONTRÉAL: Protéger et restaurer l’unité familiale

Montréal
Très chers frères et sœurs dans le Christ,
En ces temps marqués par des déplacements humains d’une ampleur sans précédent, je me tourne vers vous avec un appel à la solidarité évangélique. Une réalité douloureuse touche profondément notre conscience chrétienne : celle des familles de réfugiés séparées durant de longues années, parfois pendant une grande partie de la vie d’un enfant.
La famille, un don sacré de Dieu
L’Écriture nous enseigne la dignité et la beauté du lien familial. Dans l’Évangile selon saint Matthieu, Jésus nous rappelle :
« N’avez-vous pas lu que le Créateur, dès l’origine, les fit homme et femme (…) ? Ainsi, ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Que l’homme donc ne sépare pas ce que Dieu a uni. » (Mt 19, 4-6)
Cette parole du Seigneur nous révèle que l’unité familiale est un projet divin, non une simple convention sociale. La famille est le lieu où la vie naît, grandit et s’enracine dans l’amour. Elle est le sanctuaire premier de l’espérance.
L’appel de l’Église
Le pape François nous exhorte, dans son message pour la Journée mondiale du migrant et du réfugié 2018, à « promouvoir et protéger l’unité familiale, y compris la famille élargie, sans la conditionner à des exigences économiques ». Il souligne aussi la vulnérabilité particulière des enfants migrants, surtout lorsqu’ils sont séparés de leurs parents.
Ici même, au Canada, de nombreuses familles vivent dans l’attente déchirante de retrouvailles. Plusieurs d’entre elles sont séparées depuis quatre, cinq, parfois même davantage d’années.
Un cri qui ne peut nous laisser indifférents
Permettez-moi de vous partager le témoignage poignant d’un père réfugié :
« Ma fille avait quatre ans lorsque je l’ai tenue dans mes bras pour la dernière fois. Elle en aura dix lorsqu’elle sera enfin autorisée à me rejoindre. Je perds la moitié de son enfance pendant que je bâtis notre avenir ici. »
Ce cri du cœur nous interpelle tous. Comment rester insensibles devant une telle souffrance ? Comment justifier que des parents soient privés de ces années précieuses avec leurs enfants ? Ce n’est pas seulement une question administrative : c’est une question d’humanité, de justice, de foi.
Notre réponse de disciples du Christ
En tant que baptisés, nous sommes appelés à être témoins de l’unité, de la miséricorde et de la paix. La Doctrine sociale de l’Église nous enseigne que « la famille est le sanctuaire de la vie » (n° 231) et que « le bien commun de la famille est inséparable du bien de la société tout entière » (n° 229).
Une invitation à la charité fraternelle
Frères et sœurs bien-aimés, les paroles de saint Jean résonnent avec force aujourd’hui :
« Si quelqu’un possède les biens de ce monde, et que, voyant son frère dans le besoin, il lui ferme son cœur, comment l’amour de Dieu pourrait-il demeurer en lui ? » (1 Jn 3, 17)
Ces familles séparées sont nos frères et nos sœurs. Leur espérance de se retrouver doit devenir aussi notre espérance et notre engagement. Dans la prière, dans la parole, dans l’action, chacun de nous peut contribuer à faire entendre leur voix et à soutenir les efforts pour une réunification plus juste et plus humaine.
Confions-nous à Marie
Que Marie, Mère de toutes les familles, elle qui a connu l’exil avec Joseph et l’Enfant Jésus, intercède pour chaque famille dispersée. Qu’elle nous inspire le courage de ne pas rester indifférents et de marcher résolument sur les chemins de la compassion et de la justice.
Je vous confie cette intention dans la prière et vous assure de la mienne. Que Dieu vous bénisse et vous garde dans son amour.
✠ Christian Lépine
Archevêque de Montréal
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